Micropsychanalyse et institution

quelques réflexions à propos d'un cas d'autisme

Membre de l’Institut français de Micropsychanalyse, François Jeanparis organise régulièrement des séminaires de formation micropsychanalytique et des rencontres pluridisciplinaires en Bourgogne. Il est coauteur du livre de psychosomatique dont j’ai dirigé la publication, Les maux du corps sur le divan. Perspective psychosomatique. Il participe de très longue date aux symposiums de la Société Internationale de Micropsychanalyse. Ci-dessous la première intervention qu’il y a faite, publiée dans l’ouvrage De la psychanalyse à la micropsychanalyse, Borla, 1990.

Introduction

En prenant un cas comme illustration, je vais tenter de montrer comment l’autisme confirme certaines notions micropsychanalytiques concernant la relation primaire à la mère. Ce cas permet, en effet, de vérifier que l’autisme résulte d’une fixation au stade initiatique-oral.

Je vais aussi parler de la manière dont peut intervenir un micropsychanalyste dans une institution pour patients gravement atteints et de la possibilité d’utiliser certains appoints techniques de la micropsychanalyse, par exemple l’étude des photographies ou des enregistrements de séances. L’institution où j’interviens depuis environ quatre ans est spécialisée dans l’hébergement et le traitement de patients atteints d’affections psychiatriques se traduisant par un handicap sévère : autismes ou névroses invalidantes, maladies génétiques ou séquelles d’affections néo-natales. La présence de deux psychanalystes, effectuant un travail de psychothérapie individuelle ou de groupe, m’a poussé à accepter ce poste dans l’espoir d’une institution parlante.

Une équipe d’une vingtaine d’éducateurs assure le considérable travail quotidien de soins et d’aide pour les gestes les plus simples, qui va de la toilette à l’alimentation à la cuillère, des balades aux occupations diverses. Des réunions d’équipe, régulières, permettant au psychiatre micropsychanalyste d’être tenu au courant des épisodes survenus dans la maison et de revenir en détail sur certains cas ; effectivement, un des buts de ces rencontres est de susciter la transmission d’informations et, théoriquement, d’éviter les problèmes liés à certains non-dits.

L’anamnèse a été particulièrement difficile à mener car le dossier de l’institution ne disait rien des antécédents lorsque j’ai pris ce cas en charge et il m’a fallu beaucoup de patience pour parvenir à avoir connaissance du dossier hospitalier. Paulette est le cinquième et dernier enfant, non désiré, d’une famille rurale. La grossesse semble avoir été marquée par des difficultés, car la mère aurait été obligée de s’aliter durant une assez longue période et l’accouchement aurait eu lieu avec 15 jours de retard sur la date prévue. Malheureusement, le dossier médical n’est pas clair sur un point important: y a-t-il eu tentative d’avortement ou menace de fausse couche ? Lorsque la mère rentre de la maternité, le père présente un ulcère gastrique perforé.

A 8 mois, on note un retard psychomoteur : Paulette ne peut pas garder la position assise et n’arrive pas à tenir sa tête. A 10 mois a lieu la première consultation pédiatrique avec une hospitalisation de trois semaines. Suivront trois hospitalisations dans le service de psychiatrie infantile du Centre Hospitalier Régional ; on n’en a aucune trace. Paulette est admise à 8 ans en service de pédopsychiatrie, avec le diagnostic d’autisme in fantile grave: elle y restera 10 ans.

A 9 ans, une crise d’épilepsie partielle avec absence est signalée, mais le dossier ne précise pas s’il y a eu d’autres manifestations comitiales auparavant. On retrouve une fracture du crâne à 10 ans, consécutive à une bousculade. Diverses crises sont signalées par la suite, et portent l’étiquette de crises d’épilepsie généralisée ou épileptiformes. Malgré un examen neurologique normal, avec électro-encéphalogramme et scanner normaux à 14 ans, un traitement anticomitial est mis en place, qui dure encore.

Le seul élément clinique à ma disposition concernant l’admission de Paulette à 18 ans dans l’institution où j’interviens est qu’elle a présenté une anorexie grave durant plusieurs mois : son poids était tombé de 20 kilos et toute l’équipe éducative a dû développer des trésors de patience pour la réalimenter. A son arrivée, « elle a failli mourir » m’a-t-on précisé. A 18 ans, on ne note aucun signe de puberté.

Il s’agit donc, comme cela arrive fréquemment, d’un cas de séquelles d’autisme infantile primaire laissé pratiquement à l’abandon, à part les soins corporels de propreté ou alimentaires. Ma prise en charge allait quelque peu modifier l’attitude générale concernant Paulette et stimuler l’activité institutionnelle.

En ce qui concerne les relations avec la famille, elles étaient des plus simples : la mère faisait ce qu’elle voulait, décidant lorsque cela l’arrangeait de prendre Paulette chez elle, où (je l’ai appris lors de réunions d’équipe) elle laissait sa fille au lit toute la journée, la nourrissant exclusivement de laitages. Je n’ai pu avoir que de rares contacts avec la mère. Il s’agit d’une femme dynamique d’environ 50 ans, présentant un tableau de mère exclusive ; elle ne se préoccupe que de la santé physique et de la tenue vestimentaire de sa fille, elle l’empêche d’effectuer des gestes répétitifs de grattage du nez, et n’écoute apparemment pas ce qui lui est dit : par exemple, quand je lui ai expliqué que j’aurais besoin de photographies familiales pour un nouveau travail avec Paulette, elle m’a répondu qu’elle y penserait ; je n’ai pas de nouvelles depuis… L’attitude de Paulette face à sa mère s’activant à des soins sur sa personne était empreinte d’un regard de fascination devant le visage et les yeux maternels, ainsi que d’une très vive agitation anxieuse ; on peut observer le même tableau lorsque quelqu’un s’approche trop de Paulette.

La mère de Paulette a été opérée d’un cancer du sein il y a quelques mois, mais je ne sais pas en quels termes la fille en a été informée. Quoiqu’il en soit, deux mois après cette intervention, Paulette a présenté une tumeur du sein qui s’est révélée bénigne aux investigations. Il vaut la peine de préciser que la poitrine de Paulette avait commencé à se développer quelques mois après le début de la psychothérapie. La seule apparition brève du père, lors d’une indisponibilité de la mère, m’a été rapportée sous la forme d’une réflexion de sa part : « Tiens, elle marche? Elle va tomber ! »

 

La mise en place de contacts stables

J’intervenais dans l’institution depuis environ un an lorsqu’il se produisit un incident qui me permit de prendre conscience de ce que Paulette ébauchait une relation avec moi : je venais de franchir la porte d’entrée et saluais quelques personnes; dans un coin, sous un balcon, sans que personne n’y prît garde, Paulette s’écroula, faisant ce qu’on appelait encore dans le service une « crise ». C’est à partir de ce moment que j’ai décidé de mettre en place des contacts stables avec elle, que j’appellerai plus tard psychothérapie d’inspiration micropsychanalytique.

 

Il m’a semblé intéressant d’utiliser une technique issue de la micropsychanalyse, l’étude des photographies, et j’ai demandé que l’on prenne des photographies de Paulette dans différents moments institutionnels et d’en faire des agrandissements. Chaque semaine, je me rendais avec mon dossier sous le bras vers un petit bureau mis à ma disposition et je passais une demi-heure à une heure à décrire et commenter les documents devant Paulette. L’utilisation psychothérapique des photographies n’est pas nouvelle, et je citerai pour mémoire les travaux de Mireille Curtit dans des cas de psychose chronique et de Daniela Vigna dans une prise en charge d’un jeune autiste. Plus tard, j’ai utilisé une autre technique issue de la micropsychanalyse : les enregistrements de séances, pour réécouter ce que j’avais dit ainsi que les manifestations sonores de Paulette. Afin d’établir plus de contacts avec Paulette et de stabiliser la relation, je me suis servi de toutes les ressources institutionnelles mises à ma disposition. C’est ainsi qu’un lot de ballons s’est retrouvé dans la pièce de séances, un fauteuil, un lit : j’ai mis à profit certains repas et des réunions d’équipe ; j’ai commenté sa vie quotidienne dans la maison ou ses retours de visites familiales.

 

Observations cliniques

Je ne mentionnerai ici que les éléments cliniques qui serviront de base à l’interprétation micropsychanalytique du cas.

La passivité

Le tableau habituel est celui de statue isolée et immobile. La passivité de Paulette met toute personne désirant entrer en contact avec elle dans l’obligation de la toucher, la pousser, l’emmener par la main ou même la porter. Je n’ai pas échappé à la règle en ce qui concerne le début et la fin des séances. Ces éléments cliniques m’ont conduit à envisager la possibilité d’un « toucher passif » avec, peut-être, une érotisation de ce type de relation. Cette attitude passive contraste avec l’activité masturbatoire auto-érotique.

La manière dont s’actualise le couple actif-passif chez Paulette peut être illustrée par sa relation transférentielle, qui a été marquée par deux phases. La première pourrait être qualifiée de lune de miel : en effet, après la première rencontre où Paulette m’a mordu le sein quand deux personnes l’ont conduite vers moi, quelque chose s’est rapidement mobilisé en elle ; j’ai pu noter des sourires de satisfaction, une déambulation devant moi lors de mes départs (ce que personne ne l’avait encore vu faire), une certaine attention lorsque j’arrivais, des sortes de danses de séduction qui rappelleraient les observations de certains auteurs concernant le nouveau-né dans ses tout premiers essais relationnels avec la mère. J’ai même eu droit à une tentative d’étreinte (?), alors que j’étais assis par terre avec elle en lui tournant le dos, mais le mouvement s’est rapidement arrêté. Durant cette phase, où elle acceptait le maternage, elle faisait comprendre qu’elle souhaitait rester en ma présence, y compris pour les repas et les réunions d’équipe. Au cours de ces repas, j’ai été frappé par sa voracité orale : la cuillerée promise devait impérativement lui être donnée immédiatement. Un virage d’expression transférentielle a été amorcé lorsque j’ai dû m’absenter pour une période assez longue. A mon retour, elle m’a accueilli avec une jubilation intense, mais éphémère. Elle s’est ensuite réinstallée dans sa passivité apparemment indifférente et n’en est plus sortie.

Le langage

Paulette ne communique pas verbalement, même si, à un moment ou à un autre, j’ai pu entendre quelques mots murmurés, à peine audibles ; mais elle semble comprendre ce qu’on lui dit, ainsi que l’attesterait cette observation : un jour où je lui faisais part de mon découragement, lui disant que je ne voyais plus ce que je pouvais faire pour elle, j’ai senti sa main se poser sur moi.

Au point de vue de la communication non verbale, Paulette a eu des réactions douloureuses, sous forme de cris quand elle entendait ma voix et que le contexte du travail pouvait évoquer la scène primitive.

Le regard

La clinique repose sur l’observation directe et l’examen des clichés photographiques.

J’ai pu noter l’habituel « regard ailleurs » avec parfois un bref regard « posé » qui se rapprocherait du toucher. En ce qui concerne la vision monoculaire classique, j’ai pu observer un jeu de balancement d’un œil à l’autre qui pourrait apparaître comme une tentative d’agir sur l’objet voire de la maîtriser ; ce qui n’est pas sans rappeler l’activité d’accommodation-désaccommodation décrite par G. Haag. Sur quelques rares clichés, lorsque Paulette était isolée, l’instantané a pu saisir l’œil qui fixe l’objectif ce qui semblerait être le seul élément actif visible de mise à distance de l’intrus-photographe qui s’approche.

L’inhibition massive du toucher

Habituellement, Paulette ne touche rien avec les mains ou une quelconque partie de son corps ; elle ne prend rien, même pas la nourriture qui lui est donnée par les éducateurs. Il est très rare qu’elle transgresse son tabou du toucher. Les seuls touchers actifs qui ont pu être observés entrent dans le contexte de la relation transférentielle. Ainsi, il lui est arrivé de toucher mon ventre du talon en fin de séance ou de me donner un coup de tête alors que je l’aidais à se lever. Dans ce contexte, rappelons sa tentative d’étreinte lorsque je lui tournais le dos pendant l’étude des photographies et sa main posée sur mon épaule quand je lui disais mes difficultés concernant la psychothérapie.

Une forme particulière du toucher mérite une mention spéciale. Il s’agit de chutes, les mains à plat. Par exemple, elle tombe ainsi dans la pièce de séances lorsque je sors son dossier de photographies et jubile, vautrée sur les documents qu’elle fait glisser les uns sur les autres; de même, elle chute sur ses mains, derrière la maison, dans un endroit où personne ne va ; elle était peut-être à la recherche de ma voiture, car je vois encore son sourire lorsque je lui ai communiqué cette interprétation transférentielle.

 

Interprétation micropsychanalytique

Les éléments dont je dispose me permettent de livrer quelques réflexions micropsychanalytiques concernant la relation à la mère primaire et le tabou du toucher.

Relation à la mère primaire

De nombreux auteurs ont décrit la mère type de l’autiste. Il s’agirait de femmes dépressives, distantes, n’anticipant pas les besoins de leur enfant, faussement présentes ou même absentes. La mère de Paulette semble entrer, au moins partiellement, dans cette description, mais elle s’est trop tenue à l’écart du micropsychanalyste et de l’équipe éducative pour qu’on puisse l’affirmer avec certitude et apporter plus de précisions. En revanche, ce qui ressort clairement des observations recueillies, c’est que Paulette — où plutôt son ça-inconscient — présente une fixation massive à la mère primaire, c’est-à-dire à la mère initiatique-orale vécue fusionnellement à travers le dynamisme de co-pulsions partielles. Cette fixation se manifeste quasi directement dans le tableau clinique qui pourrait donc pratiquement servir de modèle de relations à la mère primaire. C’est ce que je vais essayer de développer maintenant. La relation à la mère apparaît d’emblée agressive-sexuelle et fondamentalement ambivalente, marquée par une dynamique de fusion-défusion fortement anxiogène. Souvenons-nous à ce propos des deux phases transférentielles de la psychothérapie et de la fascination en présence de la mère réelle. Ces éléments corroborent les constatations de G. Haag, qui interprète les dessins d’autistes comme représentant deux corps fusionnés, et celles de F. Tustin pour qui « le problème chez l’autiste est qu’il est double ».

Au stade très primaire de son développement auquel l’autiste est resté fixé, la relation d’objet est celle du narcissisme primaire et le système pulsionnel fonctionne selon les co-pulsions partielles se déchargeant anarchiquement à l’aide d’objets également partiels. Des éléments maternels sont pris comme objets co-pulsionnels au même titre que des éléments propres au sujet, ce qui détermine une intimité psychobiologique enfant-mère — définie comme un fonctionnement co-pulsionnel en circuit fermé avec la mère — le monde ambiant n’est vécu qu’à travers elle.

Au point de vue du schéma corporel, l’enfant normal unifie relativement rapidement ses co-pulsions partielles et s’individualise en totalisant l’objet maternel, ce qui lui permet de structurer des représentations de ses limites corporelles. L’autiste, lui, garde une représentation éclatée de son corps issue du fonctionnement autonome de ses co-pulsions partielles. D’où un schéma corporel aux limites toujours floues, si ce n’est pratiquement inexistantes. On retrouve là le « démantèlement » décrit par D. Meltzer et la structure en « trous » de F. Tustin citée par G. Haag qui parle de « creux noirs pleins de trous et de liens coupés ».

Ainsi, le repli autistique réalise un compromis vital : une tentative désespérée de créer des limites corporelles et d’éviter leur effraction angoissante, tout en maintenant l’intimité psychobiologique avec la mère. D’où les expressions désormais reconnues de « forteresse vide » (B. Bettelheim) et de « carapace » (F. Tustin).

Le tabou du toucher

Comment expliquer la fixation initiatique-orale de l’autiste et l’arrêt quasi total du développement psychosexuel qui en résulte ? Au fil des années de travail psychothérapeutique s’est imposée à moi l’hypothèse d’un refoulement massif de la co-pulsion tactile en rapport avec un tabou du toucher particulièrement effectif.

Pour la micropsychanalyse, la co-pulsion tactile est un élément essentiel et très primaire de développement psychosexuel. En effet, une co-pulsion se définit comme une unité motrice entre entités psychobiologiques. Par essence-même, ell e tend à établir un contact, assurer des connexions, actualisant dynamiquement l’aspect pseudopodique de l’Ide. Dans ce sens, tout le développement psychosexuel est concerné par le toucher qui, primairement, est le contact de n’importe quelle zone érogène — y compris le corps entier — avec l’objet de la co-pulsion partielle qui y prend source. Cela rejoint les données de Didier Anzieu qui, partant de l’éthologie, parle de la nécessité du contact pour la constitution du Moi-peau.

On comprend donc que, lorsque le toucher est massivement tabou, le développement de toute la relation d’objet est affecté. D’où le blocage, chez l’autiste, du développement du langage verbal et de la socialisation.

Le pointing décrit par plusieurs auteurs — c’est-à-dire, pour certains autistes, le fait de s’aider de la main d’un observateur pour attraper quelque objet — pourrait apparaître comme un mode évolutif favorable.

Quant à la psychogénèse du refoulement de la co-pulsion tactile et de la structuration d’un tel tabou du toucher, j’émettrais l’hypothèse d’une forte prédominance agressive dans le développement psychosexuel, en rapport avec des perturbations graves de la relation à la mère primaire.

Sur cette base, revenons à l’aspect clinique. Au stade oral, le mamelon peut être vécu aussi bien comme quelque chose qui remplit et procure du plaisir que comme un objet qui fait effraction et déchire les limites corporelles en entraînant une angoisse vitale. Quand la relation à la mère est perturbée et fortement conditionnée par les co-pulsions agressives, l’allaitement peut être vécu de manière prédominante dans le registre de la menace vitale, ainsi qu’en attesteraient les travaux de P.C. Racamier sur les frustrations précoces.

La mère primaire est vécue surtout comme mauvais sein, dans une ambivalence exacerbée impliquant une dialectique pratiquement insoluble de destruction-réparation. Il semble que la seule solution, extrêmement invalidante, de réparation de l’objet soit de l’ériger en tabou et de la maintenir à distance. Sous l’angle des co-pulsions tactiles, on peut ramener la clinique de l’autisme à une angoisse très primaire liée au toucher direct du sein, partie-pour-le-tout de la mère, au regard qui est vécu comme un toucher, à la voix et aux mots qui touchent, pénètrent… Ce qui éclaire le repli défensif de l’autiste, avec son tabou du toucher, son refus du langage verbal et des contacts sociaux. La mise à distance du mauvais sein ou de la mauvaise mère, le maintien de cette distance tout en conservant l’intimité psychobiologique à l’objet maternel apparaissent comme des processus très actifs contrastant avec la passivité manifeste.

Cette interprétation micropsychanalytique pourrait éclairer l’hypothèse de G. Haag qui envisage dans l’autisme une « particulière inhibition de la pulsion d’emprise dont l’origine est certainement complexe, à point de départ souvent néo-natal… ». Cela permet de donner tout leur sens aux éléments cliniques rapportés par D. Marcelli quand il parle « d’objets brûlants » dans la main de certains autistes avec une remarquable discrimination entre objets mous et objets durs, et par G. Haag quand elle évoque le « hérisson » ainsi que les véritables déchirements éprouvés par certains autistes qui commencent à parler.

 

Conclusion

J’ai tenté de donner un aperçu d’une manière d’intervenir du micropsychanalyste en Institution pour cas graves. Au terme de trois ans de travail psychothérapeutique avec cette patiente autiste, on note une impression générale de moindre souffrance, avec moins de cris désespérés, ce qui permet de dire que mon intervention a été bénéfique. Il est ainsi possible d’envisager qu’un réel travail micropsychanalytique, avec une moindre résistance familiale, voire institutionnelle, aurait eu un impact plus important. Peut-être également qu’un tel travail à huit ans, à son arrivée en Service de Pédopsychiatrie, aurait permis d’éviter une évolution aussi défavorable. Au point de vue clinique et étiologique, j’ai émis l’hypothèse que l’autisme résulte d’une fixation agressive-sexuelle à prédominance agressive à la mère primaire et d’un refoulement massif de la co-pulsion tactile. De nombreux éléments du tableau clinique peuvent ainsi se ramener à un tabou du toucher très archaïque.

 

Bibliographie

  1. Anzieu, Le Moi-peau, N.R.P. n. 9, 1974. Le dehors et le dedans, pp. 195-208.
  2. Bettelheim, La forteresse vide, Gallimard, Paris, 1976.
  3. Curtit, A propos d’un cas d’anorexie mentale : utilisation psychothérapeutique de l’étude micropsychanalytique des photographies. Mémoire de C.E.S. de psichiatrie, Faculté de Médecine de Besançon, 1981.
  4. Fanti, L’homme en micropsychanalyse, Buchet-Chastel, Paris, 1988 (1981).
  5. Fanti, Dictionnaire pratique de la psychanalyse et de la micropsychanalyse, Buchet-Chastel, Paris, 1983.
  6. Haag, L’autisme infantile précoce et phénomènes autistiques, in La psychiatrie de l’enfant, Volume XXVII – 2, 1984.
  7. Laplanche et J.B. Pontalis, Vocabulaire de la psychanalyse, PUF, Paris 1984.
  8. Marcelli, La position autistique, hypothèses psychopathologiques et autogénétiques, in La psychiatrie de l’enfant, Vol. XXVI – 1, 1983.
  9. Meltzer, J. Bremner, S. Hoxter, D. Weddel, I. Wittenberg, Exploration dans le monde de l’autisme, Payot, Paris, 1980.

P.C. Racamier, De psychanalyse en psychiatrie, Etudes psychopathologiques, Payot, Paris,   1979.

  1. Tustin, Autisme et psychose de l’enfant, Seuil, Paris, 1977.
  2. Vigna, Autismo e fotografia, Bollettino dell’Istituto Italiano di Micropsicoanalisi, n. 3, 1986.

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